Comment dissuader l’employeur de mettre en place la nouvelle DUP

Article paru dans actuEL-CE.fr (13/10/16), et transmis par l’auteur.

Dans la foulée de la loi Macron, la loi Rebsamen a été votée en août 2015 sans rencontrer d’opposition majeure, ni des syndicats, ni des députés. Quelques mois après sa mise en vigueur, les salariés et leurs représentants découvrent son contenu concret et ses effets négatifs, en particulier pour ce qui concerne la DUP (délégation unique du personnel). Rappelons que cette DUP  peut être mise en place dans les entreprises de moins de 300 salariés et qu’elle regroupe CE, DP et CHSCT au sein d’une seule instance, comme le résume le schéma suivant.

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Cette nouvelle DUP est problématique :
– Elle raréfie le nombre de réunions obligatoires : 6 par an, contre auparavant 28 ou 22 pour des instances séparées, selon la taille de l’entreprise;
– Elle réduit considérablement le nombre de représentants du personnel, comme le montre notre tableau ci-dessous, handicap d’autant plus lourd que la pertinence de l’intervention d’une IRP tient en premier lieu à la richesse de sa réflexion collective et donc au nombre de ses « têtes pensantes ».

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Renvoyer l’employeur à son obligation de sécurité
Heureusement, les représentants du personnel ne pas démunis pour contester la DUP. Mettre en place une DUP est en effet une faculté offerte à l’employeur, et non une obligation. Elle engage donc sa responsabilité, au titre de son obligation de protection de la santé des travailleurs. Lorsque l’établissement est régulièrement confronté à des risques ou accidents graves (y compris en termes de risques psychosociaux), les élus dénonceront la réduction des moyens dévolus au CHSCT, inhérente à la constitution d’une DUP, et l’impact défavorable qui en résultera pour la prévention des risques.

Ils le feront par le vote d’une motion : elle constituera un élément à charge si la responsabilité de la direction est mise en cause à l’occasion d’un accident. Plus tard, ce vote sera renouvelé pour tout accident grave illustrant la nécessité d’un retour à un CHSCT distinct.

« Les élus constatent que l’entreprise est régulièrement confrontée à :

  • Des accidents du travail graves [se référer aux documents disponibles].
  • Des incidents répétés [à préciser : crises de larmes, dépressions, violences verbales, tentatives de suicide, etc.] révélant la présence de RPS dans plusieurs services [à préciser].
  • Une augmentation des arrêts-maladies, notamment due à des surmenages et des débordements d’horaires [à préciser].

Dans ce contexte, ils rappellent que la DUP n’est pas une obligation, mais une faculté offerte à l’employeur, et que ce choix engage sa responsabilité au regard de son obligation de protection de la santé des travailleurs. Ils exigent en conséquence que la direction renonce à la mise en place d’une DUP [ou réinstaure des instances séparées], pour que le CHSCT retrouve tous ses moyens antérieurs et puisse exercer au mieux ses missions dans l’intérêt de la préservation de la santé professionnelle.

À toutes fins utiles, ils précisent que la présente motion sera envoyée, pour information, au médecin et à l’inspecteur du travail, ainsi qu’à la CARSAT [ou CRAMIF pour l’Île-de France]. »1

Bien sûr, les élus n’ont pas le dernier mot et l’employeur pourra passer outre cette motion et décider de mettre en place la nouvelle DUP. Mais cette motion peut néanmoins faire réfléchir l’employeur sur l’intérêt réel de regrouper les instances.

DUP par accord à partir de 300 salariés : aux élus minoritaires d’agir

Pour ce qui concerne les entreprises d’au moins 300 salariés, le personnel n’a rien à attendre de positif des regroupements par accord collectif prévus aux articles L. 2391-1 à L. 2391-4 du Code du travail. Ces accords seront inévitablement le résultat d’un chantage à l’emploi, appelant à des concessions sous prétexte de gagner en compétitivité. A cet égard, les décrets d’application de la loi Rebsamen sont révélateurs : ils définissent des seuils minimaux extrêmement faibles, tant pour le nombre d’élus que pour le crédit d’heures (article R. 2391-3 du Code du travail).

Pour que chacun prenne ses responsabilités, en toute transparence, les élus minoritaires auront intérêt à prendre date en soumettant au vote une motion similaire à la précédente, de façon à ce que les impératifs de santé au travail ne soient pas évacués des débats…

En conclusion, la volonté du Medef de réduire le coût des IRP et d’affaiblir le contre-pouvoir qu’elles représentent est surprenante : elle vulnérabilise les chefs d’entreprise qui peuvent se voir accuser devant les tribunaux de ne pas mettre en œuvre tous les moyens nécessaires à la protection des travailleurs. De surcroît, plus que jamais, les employeurs ont besoin des représentants du personnel pour connaître le travail réel. En effet, leurs pratiques managériales les éloignent de plus en plus des réalités du terrain, ainsi qu’en atteste la commande par la SNCF de trains trop larges pour entrer dans les gares, avec pour conséquence 1300 quais à rectifier2. Les dirigeants enclins à ne voir dans le dialogue social qu’un coût encombrant auraient intérêt à méditer sur cette aberration car, malheureusement, elle est loin de constituer une exception…

Par Olivier Sévéon3

Notes   [ + ]

1. Exemple de motion votée pour s’opposer à l’instauration d’une DUP
2. Information révélée par le Canard enchaîné dans son édition du 21 mai 2014.
3. Expert des CHSCT et CE depuis 1983, Olivier Sévéon forme aussi les élus de ces instances à l’exercice de leurs mandats. Ce diplômé d’HEC, qui se montrait très critique sur l’avant de projet de loi Rebsamen dans une interview parue dans notre édition du jeudi 7 mai 2015, continue à dénoncer le contenu de cette loi, rendu applicable récemment avec la parution de ses décrets. Olivier Sévéon est aussi l’auteur de :  « CHSCT : les bonnes pratiques », paru aux Editions Gereso en février 2016.
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Les 12 propositions du réseau Anact

Depuis leur création, les CHSCT voient, sans cesse, leur rôle croître et s’amplifier sur les sujets de santé et de conditions de travail. Parallèlement, l’environnement socio- économique évolue lui aussi. D’où l’impérieuse nécessité de mise en cohérence de l’instance avec son contexte.

Accompagner l’évolution du cadre de travail des CHSCT

  • Proposition n°1 | Clarifier le champ d’action
  • Proposition n°2 | Organiser l’articulation entre les CHSCT dans les grandes entreprises

Développer les compétences

La performance du CHSCT, c’est-à-dire l’efficacité de ses décisions, la qualité de ses débats, sa place reconnue dans l’entreprise, s’obtient si tous les acteurs sont dans une dynamique constante de progrès sur leurs compétences. Cette dynamique s’inscrit dans un véritable parcours de développement des compétences, concernant tous les acteurs du comité.

  • Proposition n°3 | Mettre en œuvre un parcours de développement des compétences des acteurs du CHSCT
  • Proposition n°4 | Enrichir la formation des élus
  • Proposition n°5 | Soutenir le rôle du président
  • Proposition n°6 | Appuyer l’action des acteurs ressources, membres de droit
  • Proposition n°7 | Rompre l’isolement de l’instance en favorisant les échanges de pratiques

Soutenir le CHSCT

Le CHSCT est une instance de représentation du personnel contribuant activement à la qualité de vie au travail des salariés. Son action mérite d’être soutenue sur des points essentiels tels que l’évaluation de ses résultats, ses relations avec la hiérarchie et les salariés en général, pour mieux être en capacité d’infléchir des choix productifs et organisationnels au regard des conditions de travail.

  • Proposition n°8 | Doter les CHSCT d’un outillage d’évaluation pour identifier des leviers de progression
  • Proposition n°9 | Favoriser l’articulation entre le CHSCT et les salariés
  • Proposition n°10 | Optimiser l’intervention des CHSCT dans les projets de l’entreprise
  • Proposition n°11 | Inscrire l’action dans la durée
  • Proposition n°12 | Outiller les managers, les fonctions ressources humaines et de prévention

 

Source : Travail et changement 345

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Ressources biblio #CHSCT


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Une petite sélection de ressources utiles pour le CHSCT, dont ces deux in-dis-pen-sables : 

Sévéon, Olivier. CHSCT : les bonnes pratiques. Le Mans: Géréso, 2016.
Brégier, Valentine, and Gérard Bregier. Le CHSCT en pratique. Paris: Eyrolles, 2015.

Pour les quelques références ci-dessous, elles pourront être aisément trouvées via OpenEdition, et en texte intégral pour la plupart des articles depuis cairn.info, nrt.revues.org, pistes.revues.org, etc.

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Formation des membres CHSCT de la Fonction publique

Loi n°2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

Article 71 [État] : Après le 7o de l’article 34 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, il est inséré un 7o bis ainsi rédigé: «7o bis A un congé avec traitement, d’une durée maximale de deux jours ouvrables pendant la durée de son mandat, s’il est représentant du personnel au sein des instances mentionnées aux articles 15 et 16 de la présente loi, compétentes en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail.
Ce congé est accordé, sur demande du fonctionnaire concerné, afin de suivre une formation en matière d’hygiène et de sécurité au sein de l’organisme de formation de son choix. Les modalités de mise en œuvre de ce congé sont fixées par décret en Conseil d’État».

Article 72 [FP Territoriale] : La loi no 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifiée: 1o Le 11o du II de l’article 23 est complété par la référence: «et au III bis de l’article 33-1»; 2o Après le III de l’article 33-1, il est inséré un III bis ainsi rédigé: «III bis. – Les collectivités territoriales et leurs établissements publics accordent à chacun des représentants des organisations syndicales au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail un crédit de temps syndical nécessaire à l’exercice de son mandat.
Dans les collectivités territoriales et les établissements publics de moins de cinquante agents, ce crédit de temps syndical est attribué aux représentants du personnel siégeant au comité technique dont ces collectivités et établissements publics relèvent en application du I.»; 3o Après le 7o de l’article 57, il est inséré un 7o bis ainsi rédigé: «7o bis A un congé avec traitement, d’une durée maximale de deux jours ouvrables pendant la durée de son mandat, s’il est représentant du personnel au sein de l’instance compétente en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail mentionnée au I de l’article 33-1.
Ce congé est accordé, sur demande du fonctionnaire concerné, afin de suivre une formation en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail au sein de l’organisme de formation de son choix.
La charge financière de cette formation incombe aux collectivités territoriales et aux établissements publics. Les modalités de mise en œuvre de ce congé sont fixées par décret en Conseil d’État».

Via Legifrance

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Entretien avec le DRH de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie

Guenael Pira, directeur des ressources humaines de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, lors du Club RH de Lille le 31 mars dernier :

En matière de prévention de l’absentéisme, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est la formation la plus importante. Un vecteur de partage de l’expertise, de compréhension et de planification avec des actions connues de tous et qui s’imposent à tous. Le CHSCT peut se nourrir des outils règlementaires pour faire des préconisations. Il est le lieu où on fait un retour sur les actions mises en place. Il faut le rendre vivant.

Via Lagazette.fr

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Représentants du personnel au CHSCT, faites-vous connaître !

35,6% des salariés disent avoir reçu une information sur les risques auxquels ils sont exposés (selon une étude de la Dares). Pour 40,4%, ils déclarent que cette information provient de leurs représentants du personnel.

Si 61 % des salariés déclarent par ailleurs être couverts par un CHSCT, ils sont encore trop nombreux d’après la même étude à simplement ignorer si un CHSCT est en place dans leur entreprise (1 sur 5, contre 1 salarié sur 4 en 2005).

Via Juritravail

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